SORORITÉ: Une conversation de femmes

AWDF
5 min readAug 29, 2022

Écrit par: Merveilles Tazou, stagiaire en communication, AWDF

Triste nouvelle, elle a été assassinée par son mari à coups de machette! Tel est le message qui a suscité l’émoi des femmes et qui a été à l’origine de cette conversation.

Le 19 juillet dernier, comme tous les jours après ma routine matinale, je me suis connectée sur whatsapp pour consulter ma messagerie et c’est avec lassitude et écoeurement que j’ai lu ce message dans un groupe de femmes où je suis membre.

La jeune femme dont il est question est une jeune sénégalaise agée de 18 ans qui aurait subit plusieurs coups de machette par un mari violent et récidiviste avant de succomber. Aminata Mboulo Ndiaye nous a quittés. Une femme de plus qui y passera, mais malheureusement pas celle de trop, en tout cas pas encore vu qu’après elle de nombreuses femmes le vivront encore et en mourront peut-être, elles aussi. D’ailleurs, il faut croire que la violence basée sur le genre est un fléau transnational et transfrontalier!

Pas plus tard qu’il y’a deux semaines, une vidéo devenue virale sur les réseaux sociaux mettait en scène une jeune femme Camerounaise qui se faisait aggrésser et humilier publiquement par un homme inconnu pour un problème qui aurait pourtant pû se résoudre à l’amiable. De telles vidéos et de telles scènes existent par milliers et par millions dans tous les pays d’Afrique sans exception vu que c’est de l’Afrique qu’il est question dans cet article. Et ceci n’est pas un cliché comme on aime nous le faire croire, mais bien une réalité. Celle de nombreuses femmes.

Personnellement, cette situation me dépasse et à chaque fois je me sens toujours autant impuissante et on nous répète encore qu’au nom de la culture, c’est totalement acceptable et même normale qu’un homme “corrige” sa femme de temps à autre et les femmes elles même le soutiennent très souvent.

Toutefois, il est réconfortant et rassurant de voir comment les mentalités évoluent avec une nouvelle génération de femmes qui comprennent les pièges du patriarcat et ne se laissent plus berner par les belles promesses du mariage. Elles résistent et font entendre leurs voix, chacune à son niveau, avec les outils dont elle dispose. C’est ce que j’ai retenu de cette conversation whatsapp que nous avons eu ce 19 juillet à l’annonce du décès de notre sœur d’Afrique. Je vous laisse la découvrir et la savourer:

- Triste nouvelle, elle a été assassinée par son mari! (En indiquant la photo de la jeune femme)
- Violence conjugale?
- Oui
- C’est vraiment triste tout ça. Nous ne sommes en sécurité nulle part.
- Oui, mais le combat est entre nos mains, nous femmes. Pourquoi devons-nous subir des violences chaque jour? Viols, coups, tortures, meurtres! Jusqu’à quand allons-nous supporter? Il est temps de dire non, de dire stop. Pourquoi? De quel droit se permettent-ils celà? Nous devons briser le silence et passer à l’action.
- Justement! Ici chez nous au Mali, même nos mamans nous conseillent de supporter, que le mariage n’a jamais été facile, que la bonne femme doit être soumise à son époux et qu’elle ne doit jamais divulguer les soit-disant secrets de son foyer; et si tu décide de retourner chez eux, ils te renvoient en te disant que le mariage est ainsi fait. Même nos chefs religieux te disent qu’une bonne femme ne divorce jamais, que c’est un péché, un Haram. Bref, c’est à nous de changer ce genre de mentalités. Il y a vraiment un grand travail de sensibilisation et de dénonciation à faire.
- Le problème est que même s’il y a des lois qui incriminent ces violences, la plupart des pays n’appliquent pas ces lois. Je crois que la lutte que nous devons mener c’est que toutes les lois soient appliquées contre toute personne qui violente, torture ou tue une femme. Voir des criminels en liberté et en toute impunité encourage les autres à perpétuer ce système de violences.
- Pour nos parents, c’est nous qui devons changer leur façon de penser et la plupart n’ont pas compris que le divorce est Haram seulement si la femme est dans de bonnes conditions. Donc si un homme te traite mal, te frappe ou te demande de faire des choses hors Islam, tu as le droit de demander le divorce. Les gens n’ont pas compris que l’Islam interdit toute sorte de violences. Nos parents doivent vraiment être sensibilisés.
- Je suis d’accord avec vous chères sœurs, mais sachez que pour que cette violence s’arrête, il faudra d’abord que nous, femmes, prenons nos responsabilités et gérer nos vies. Il est vrai que les parents donnent des conseils à une jeune mariée et continueront à le faire, mais c’est à nous de ne pas mettre les hommes au-dessus de nous, de ne pas les aimer plus que nous mêmes et de ne pas nous oublier pour eux. Dénonçons et fuyons la violence! Ne laissons pas les actes agressifs de nos maris perpétuer car ils prennent plaisir au fur et à mesure. Pensons à nous, à nos enfants, à nos projets, à notre avenir, à notre liberté car personne ne viendra le faire à notre place. Même si nous avons des maris riches, qui font toutes les dépenses de la maison, montrons leur que nous avons des limites. Ne les laissons plus faire de nous ce qu’ils veulent à cause de leur situation sociale. SVP ne vous taisez pas! Le mariage est notre culture africaine, mais la domination, la torture, les violences et les féminicides ne sont pas de notre culture africaine. Je suis vraiment triste pour la sœur décédée, que son âme repose en paix.
- Tu as raison ma soeur. Certaines femmes disent que c’est pour les enfants, mais je trouve ce raisonnement très irresponsable. La vie d’une femme n’est pas forcément liée à un homme et les enfants ne s’épanouiront pas dans une ambiance de violences. Pensons d’abord à nous chères sœurs.

Je ne sais pas pour vous, mais cette conversation m’a émue aux larmes. J’espère qu’elle vous fera réfléchir et sortir de l’indifférence, si jamais malheureusement vous y êtes encore.

Sign up to discover human stories that deepen your understanding of the world.

Free

Distraction-free reading. No ads.

Organize your knowledge with lists and highlights.

Tell your story. Find your audience.

Membership

Read member-only stories

Support writers you read most

Earn money for your writing

Listen to audio narrations

Read offline with the Medium app

AWDF
AWDF

Written by AWDF

African Women’s Development Fund supports autonomous organisations on initiatives for transformation led by African women.

No responses yet

Write a response